Prince Rogers Nelson
Prince Rogers Nelson, né le 7 juin 1958 à 18h17 au Mount Sinaï Hospital de Minneapolis, Minnesota, USA, est un artiste, musicien, chanteur, producteur, compositeur, et arrangeur. Il est également, plus occasionnellement, réalisateur de clips vidéo ou de films, et acteur.
Prince a débuté sa carrière discographique en 1978, et a édité plus d’une quarantaine d’albums. Un grand nombre de ses singles sont devenus des classiques de la musique des années 1980 et 90.
Il a également été d’une influence majeure dans le domaine de l’industrie du disque, en imposant régulièrement son point de vue ou en obligeant le système à se transformer. Entre 1993 et 2000, alors en guerre contre sa maison de disques, il prend pour nom un symbole imprononçable et met de côté son précédent catalogue pendant plusieurs années.
Peu d’artistes ont créé une oeuvre aussi riche et variée que Prince. Durant les années 1980, il émergea comme l’un des talents les plus singuliers et les plus créatifs de l’ère du rock’n’roll. Capable de mélanger facilement des styles aussi variés que la pop, le funk, le jazz et le rock, il n’a pas seulement édité toute une série d’albums à grand succès. Il a aussi donné des concerts mémorables, produit un grand nombre d’artistes, écrit plusieurs centaines de chansons, et par ses choix artistiques a régulièrement provoqué des séismes dans l’industrie du disque.
Avec chaque album, Prince a démontré sa remarquable maîtrise stylistique et sa diversité musicale, en expérimentant constamment de nouvelles directions, et de nouveaux sons. Si parfois son œuvre a été inconsistante, c’est le plus souvent en raison d’un éclectisme exacerbé. Dans tous les cas, il n’existe pas d’autre artiste contemporain qui ait conjugué autant de talents avec autant de succès au cours d’une carrière de près de quarante ans.
Dans les années 1980, Prince est devenu la synthèse ultime entre le funk, le rock et la pop, a une époque ou la musique était encore très largement compartimentée. Il est peut être ainsi le dernier d’une lignée de grands créateurs, d’artistes illustres, qui ont considérablement changé le paysage musical contemporain. Son style de musique est appelé généralement le Minneapolis Sound.
On retrouve chez lui des références à James Brown, Billie Holiday, George Clinton,Sly Stone, Larry Graham, Jimi Hendrix, Frank Zappa, Carlos Santana, Led Zeppelin, les Rolling Stones et les Beatles ou bien d’autres encore…
Prince est décédé le 21 avril 2016 à Paisley Park, Chanhassen, dans le Minnesota. Il avait 57 ans. Sa mort est due à l’ingestion accidentelle de médicaments à base d’opiacées.
Identité et famille
Le véritable nom de Prince est Prince Rogers Nelson. « Prince Rogers » étant son prénom complet. Son père décida de l’appeler ainsi d’après le nom du personnage qu’il incarnait dans son groupe de jazz : le « Prince Rogers Trio ». Prince est souvent appelé à tort Roger Nelson.
Son père, John Lewis Nelson, était pianiste de jazz et travaillait le jour comme technicien plastique chez Honeywell. Sa mère, Mattie Shaw, était assistante sociale et chanteuse occasionnelle.
Mattie et John ont eu ensemble deux enfants : Prince et Tyka Evene, qui est sa seule parente directe. Il a également trois demi-frères et soeurs nés d’un premier mariage de son père avec Vivian Nelson, et deux demi-frères nés de deux pères différents en relation avec sa mère. Ce groupe de personnes constituent les héritiers du Prince Estate validés lors de la succession de Prince.
One Man Band
Probablement du fait d’une enfance tourmentée et d’une timidité relative et chronique, Prince s’enferme dès ses jeunes années dans la musique. Son père lui offre une guitare quand il est adolescent, et il s’initie seul au piano en reproduisant les génériques de ses séries télévisées préférées, dont Batman.
Au lycée, il quitte le domicile familial et se réfugie dans la cave de la maison de son meilleur ami, André « Cymone » Anderson. Il a alors accès aux instruments entreposés à cet endroit par le premier groupe de musique qu’il a contribué à créer, appelé Grand Central.
Il maîtrise rapidement l’essentiel : batterie, percussions, guitares, basse, claviers, piano, etc… il sait jouer de tout presque naturellement, à part les instruments à vent (saxo, trompette, etc…) et certains instruments à corde (violon…).
Prince s’inspire grandement de Stevie Wonder, qui réalise seul ses albums en enregistrant tour à tour chaque instrument sur une piste différente, puis les rassemble pour former une chanson complète.
Quand il est en studio, Prince débute généralement en enregistrant la batterie ou la boite à rythmes, il ajoute ensuite la basse, le piano, les guitares, les claviers, les choeurs, et il termine par la voix qu’il enregistre lui-même, dans l’intimité. En commençant une chanson, il a déjà en tête la totalité du morceau et comment doivent ‘sonner’ chacun des instruments.
La seule personne présente dans le studio à part Prince (sauf musicien invité à l’occasion) est l’ingénieur du son. Ce dernier prépare l’enregistrement et se retire lorsque Prince souhaite enregistrer les voix. Il n’est pas rare que Prince enregistre couché sur un lit ou bien à même le sol ! Prince procède ensuite lui même au mix final derrière la console.
Cette maitrise totale de l’art des instruments, et la connaissance des techniques d’enregistrement, associées à la performance vocale font de Prince un artiste exceptionnel, capable d’assurer lui même tous les stades de la production.
« Grooves and grooves up on the shelf »
La productivité de Prince est également exceptionnelle, et de notoriété publique. Elle va de pair avec sa maîtrise des instruments et de la voix : puisqu’il fait tout, tout seul, il n’a pas besoin d’attendre que d’autres musiciens soient disponibles pour enregistrer. Il peut ainsi travailler jusqu’au bout de la nuit, de façon totalement autonome. Fourmillant d’idées, il a plusieurs fois indiqué qu’il est capable d’enregistrer une nouvelle chanson chaque jour.
Durant les premières années de sa carrière, Prince est cependant restreint quant au nombre de sessions studio lui permettant d’enregistrer ses morceaux. Ces sessions sont onéreuses et sont fonction de la disponibilité du studio d’enregistrement. C’est probablement pour contourner cela que Prince organise très vite un home studio, dans sa propre maison. Cela le conduira aussi à construire son propre complexe, Paisley Park, ce qui est un cas presque unique dans le monde de la musique.
De nombreux collaborateurs attestent que Prince ne quitte pas le studio tant qu’il n’a pas terminé le morceau en cours, et certaines de ses compositions ont nécessité plus de 48h de travail !
Il existe à Paisley Park une pièce sécurisée dans laquelle étaient stockés les enregistrement en studio et en concert de Prince, pour une possible utilisation future. Certains albums ou projets de productions ont bénéficié des archives contenues dans ce « Vault« , même si Prince préfère généralement composer de nouveaux titres. On estime que plus d’un millier de titres studio inédits ont été entreposés à cet endroit. Ce qui représente, à raison de 15 titres par CD, l’équivalent de près de… 70 albums d’avance !
Les idées de chansons proviennent aussi des répétitions et jams donnés avec ses différents groupes. Il n’est pas rare qu’un simple riff de guitare ou de synthé joué en répétition soit devenu une chanson complète le lendemain matin, enregistrée et mixée durant la nuit !
En spectacle
Au delà de ses capacités hors norme de musicien de studio, Prince excelle également sur scène. Puisant son inspiration dans de nombreux artistes et groupes des années 1970, il est un condensé brillant qui suscite une grande admiration. On dit de lui qu’il chante comme Wilson Pickett, qu’il bouge comme Mick Jagger, qu’il conduit son groupe comme James Brown, qu’il joue de la guitare comme Carlos Santana, ou qu’il délivre une musique intense et rythmée comme Parliament Funkadelic.
Cette performance scénique, conjuguant l’art du spectacle, la maîtrise des instruments, et la forme physique, font de Prince un artiste complet. Qui d’autre est capable de rassembler autant de talents en un seul personnage ? Cela se remarque notamment lorsque Prince joue des reprises sur scène. Par exemple le titre de Led Zeppelin, Whole Lotta Love, est joué en endossant à la fois le personnage vocal de Robert Plant et la virtuosité guitaristique de Jimmy Page.
L’influence de James Brown est aussi manifeste lorsque Prince virevolte sur lui-même, produit un grand écart, joue avec son pied de micro, et conduit son groupe en utilisant des gestes codés ou des mots clés sur lesquels les musiciens réagissent.
Avec autant de capacités naturelles, Prince n’a pas besoin d’effets spéciaux ou d’importantes mises en scène pour assurer un show brillant pendant plusieurs heures. Certaines de ses tournées ont bénéficié de moyens importants, mais cela n’a jamais été pour cacher un vide musical ou une quelconque lacune dans l’intensité des morceaux. Sa seule personnalité lorsqu’il arrive sur scène met les foules en émoi.
Les concerts de Prince adoptent assez rapidement un côté théâtral que l’on ne trouve pas chez les artistes qui lui sont contemporains. La tournée Purple Rain, par exemple, comporte des décorations sur scène, de larges tentures au dessus, et un passage où Prince échange avec Dieu lui même ! Comme sur disque, on trouve en concert une progression d’ensemble avec un début, un milieu, et une fin très marquées. A la même époque, Madonna ou U2 sont encore dans des concerts de nature très traditionnelle, proposant juste à leur public une succession de morceaux.
L’autre aspect de Prince sur scène concerne la danse. Si certaines mises en scène sont évidemment répétées, c’est le feeling du moment qui permet à Prince de s’exprimer pleinement et de faire corps avec la musique. Cela a contribué à développer une émotion considérablement sensuelle, au regard des chorégraphies millimétrées et froides que l’on peut trouver chez Michael Jackson par exemple.
En véritable perfectionniste Prince revisionne souvent son propre concert dès que celui-ci est terminé, pour décider de ce qui est à modifier le lendemain.
Créateur d’un univers original
En dehors de la musique proprement dite, Prince a des idées très arrêtées sur le look, le son et le concept spécifique à chaque album. Chaque disque fait l’objet d’une ambiance unique : couleurs, design, et pochette participent à cet art total. Cette ambiance se retrouve sur scène avec un look en rapport, et même ses musiciens doivent se coiffer comme lui, ou porter le même style de moustache !
Le plus surprenant est que cela change pour chaque album. Il est ainsi facile de reconnaitre, surtout dans les années 1980 et 1990, à quel album correspond une photographie, un clip, ou même une chanson.
Business man visionnaire
A coté de ses incroyables compétences artistiques, Prince fut tout au long de sa carrière un artiste majeur en terme de business. N’hésitant pas à prendre des positions rebelles et des décisions surprenantes, parfois incomprises de son entourage et de ses fans, il a régulièrement provoqué des séismes dans l’industrie du disque.
A une époque où la musique noire sortait d’un disco aseptisé et n’avait pas encore regagné ses lettres de noblesse avec le hip-hop, Prince débarque en affichant un côté provocateur et malin, qui lui permettra de détrôner Michael Jackson en haut des charts en 1984.
Avec Paisley Park, ouvert officiellement en 1987, Prince maîtrise tous les stades de la production. Il produit lui même les sessions studios pour plusieurs projets en simultané, et dont certains ne verront jamais le jour. De la même manière ses moyens techniques propres lui permettent de réaliser des clips vidéos, des costumes de scène, et même de presser certains disques distribués en petite quantité. L’ensemble du projet artistique est défini sur place, y compris l’infographie des livrets de CD. Il délivre ainsi un produit fini à une maison de disques, dont le rôle est réduit à assurer la distribution et la promotion dans les chaînes de magasins traditionnels.
En 1992, Prince annonce avoir conclu avec la Warner un contrat représentant 100 millions de dollars. Très rapidement, il apparaît que ce contrat l’oblige à atteindre des volumes de ventes irréalistes. Prince va alors se mettre en opposition avec sa maison de disques, et faire naître un conflit ouvert qui va avoir une influence considérable sur sa carrière durant les années 1990. Ne détenant ni les bandes masters de ses disques, ni même le nom de « Prince » (qui est une marque commerciale détenue par la maison de disques), il décide de changer d’identité artistique et demande à ce qu’on le nomme sous la forme d’un Symbole imprononçable.
Sous ce nom il va développer une carrière parallèle, et finalement prendre avantage de cette situation jusqu’à obtenir la possibilité de réutiliser le nom de Prince en 2000. Cependant, si artistiquement le travail est considérable, sur le plan commercial Prince devient un artiste underground qui perd ses fans dans ses différents revirements discographiques.
Durant cette période, Prince va exprimer son mécontentement en inscrivant le mot « Slave » (esclave) sur sa joue droite. Ce comportement sera souvent incompris, et l’utilisation du mot esclave fut sujette à débat parmi les fans.
Recherchant constamment de nouvelles façons de diffuser sa musique, Prince éditera un CD-ROM, Interactive, en 1994. Au même moment il ouvre les NPG Stores, des magasins distribuant du merchandising et certains CD introuvables ailleurs. Il monte également les clubs Glam Slam dans lesquels il donne des concerts.
En 2004, il créé à nouveau l’événement en distribuant son album Musicology à l’entrée de ses concerts. Plus de 400 000 exemplaires seront ainsi diffusés, ce qui obligera l’industrie du disque à s’adapter pour comptabiliser les ventes. Un concept qui sera repris en 2007 pour l’album Planet Earth, distribué à 3 millions d’exemplaires en Grande Bretagne via l’hebdomadaire Mail Of Sunday , et en 2010 avec 20ten.
De nombreux artistes ont décidé de quitter le business des maisons de disques et de devenir indépendants, soit à la suite de désaccords, soit volontairement. Parmi les plus connus, Mariah CareyMichael Jackson, ou George Michael ont fait les frais du système des majors durant les années 1990 et 2000. Alors que Prince passait pour un fou lorsqu’il quitta la Warner en 1993, on applaudi aujourd’hui son courage et on le prend comme exemple pour les nouveaux cas qui se présentent. L’arrivée de l’internet grand public sur la fin des années 1990 permet également aux artistes de s’émanciper plus rapidement, tout en conservant un contact aisé avec leurs fans. Cela conduira quelques années plus tard à l’apparition du streaming et à la possibilité de diffuser sans intermédiaire de la musique auprès d’un large public.
Découvreur de talents
Au cours de sa carrière, Prince a fait émerger de nombreux talents.
Ses propres musiciens, en premier lieu, sont généralement totalement inconnus du grand public avant de travailler avec lui. Ils sont très souvent jeunes : Wendy Melvoin a intégré The Revolution alors qu’elle avait tout juste 18 ans. De même pour Brown Mark. Mayté Garcia avait 16 ans lorsqu’elle rencontra Prince, et Anna Garcia avait 17 ans. Cela ne leur a pas empêché de devenir des stars internationales et de partir en concert avec Prince partout dans le monde.
Au début des années 1980, Prince a besoin de diffuser plus largement sa musique. Il a alors l’idée de constituer des groupes parallèles, comme The Time ou Vanity 6, présentés au début comme des artistes concurrents mais tous originaires de Minneapolis. Cela contribuera à constituer le Minneapolis Sound. Lorsque le groupe The Time éclate après quelques années, les membres partent solo (Morris Day, Jesse Johnson, Jimmy Jam and Terry Lewis…) et créent des univers étendus composés de leurs propres productions.
Prince est l’artisan quasi unique de ces albums, les crédits figurant sur les pochettes et attribuant les compositions ou la production aux membres du groupe sont évidemment fantaisistes. Au registre des droits d’auteurs américains (ASCAP) c’est bien Prince qui est inscrit.
Néanmoins tous ces projets n’auront pas le même destin. Certains, comme The Family, n’auront sorti qu’un seul album, longtemps oublié avant de devenir culte.
Sheila E est une autre artiste maîtresse lancée en 1984. Avec trois albums parus sur les labels de Prince, puis une place de batteuse dans son groupe, elle survole avec lui les années 1980. Elle a ensuite réussit à maintenir une carrière lui autorisant de tourner dans le monde entier.
Seuls quelques artistes ont pu réellement faire carrière après être passés dans le giron de Prince. C’est le cas notable de Carmen Electra (dans les séries TV et quelques films), de Wendy And Lisa (dans les musiques de films). D’autres artistes poursuivent une carrière musicale, mais plus confidentielle.
Prince a également souhaité réhabiliter certains de ses mentors, comme Chaka Khan, Larry Graham, Mavis Staples ou George Clinton.