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Emancipation est le vingt-deuxième album de Prince. Il s’agit d’un coffret de 3 CD, attribué au « Symbole ». Il est le troisième album à porter ce nom après The Gold Experience et Chaos And Disorder. Il s’agit du premier album de « Symbole » à être édité en dehors du contrat avec Warner. L’album est paru le 19 novembre 1996 chez NPG Records / EMI.

1996 emancipation front
Emancipation
 

 

Genèse

L’album Emancipation est annoncé dans un communiqué de presse publié par Prince le 22 décembre 1995. Dans ce document, Prince annonce qu’il souhaite terminer au plus tôt le contrat avec Warner et qu’il est prêt à leur livrer le reste des albums attendus, sous la forme d’une compilation en trois volumes intitulée The Vault vol. I, II & III. Il indique qu’une fois libéré de ce contrat, il pourra alors sortir un album nommé Emancipation.

La situation se débloque en avril 1996 lorsque Warner proposa à Prince de réduire ses obligations à deux albums au lieu de trois. Prince leur livra alors les albums Chaos And Disorder et The Vault… Old Friends 4 Sale, dont le contenu provient essentiellement du projet de compilation The Vault.

En parallèle, il continue de développer son projet d’album Emancipation. Initialement envisagé comme un projet pouvant contenir 56 titres, il prend la forme courant 1996 d’un triple album dans lequel chaque disque comporte 12 titres, pour une durée d’exactement 60 minutes. Ce concept lui aurait été inspiré par les pyramides d’Egypte, et de la façon dont elles sont reliées aux constellations.

En septembre 1996, un rendez-vous a lieu à Paisley Park entre Prince et des représentants de la maison de disques EMI, au sujet de la distribution de l’album Emancipation. L’idée est de partager les tâches entre l’artiste et la maison de disques. Le rôle de cette dernière est d’assurer le marketing et la distribution physique du disque, qui est livré par Prince « clef en main » sous la forme d’un package avec son contenu, sa présentation, et son livret. Un second rendez-vous a lieu en octobre, à New York cette fois, et en moins de 24h un accord fut conclut. L’annonce officielle du partenariat entre Prince et EMI a lieu le 17 octobre 1996. Dans un communiqué le patron d’EMI, Charles Koppelman, se dit « excité et honoré » de travailler avec Prince. Un membre de sa famille, Michael Koppelman, a d’ailleurs travaillé comme ingénieur du son à Paisley Park entre 1989 et 1991.

L’accord conclut entre Prince et EMI est sensiblement différent du contrat passé avec Warner. Prince prend à sa charge la fabrication et le packaging du disque, ainsi que sa conception artistique et son concept marketing. Il reste propriétaire des bandes master du disque, ce qui est totalement nouveau car habituellement l’artiste livre corps et bien le produit final à la maison de disques, qui l’exploite alors avec des singles et du marketing. Dorénavant pour Prince, ce n’est plus la maison de disques qui verse un pourcentage à l’artiste sur les ventes, mais l’inverse : Prince verse à EMI un pourcentage sur les ventes réalisées ! Il a pour cela reçu une avance sur les royalties lors de la sortie du disque. Ce principe a pour effet de modifier sensiblement les revenus obtenus. Tout compris, droits d’auteurs et pourcentage, Prince peut ainsi espérer recevoir entre 70 et 90% du prix net sur les ventes de disques, alors que dans un cas normal l’artiste touche au mieux 15%.

Pour Emancipation, qui est une étape décisive dans sa carrière, Prince a fait des efforts considérables de promotion, organisant des rencontres avec de nombreux journalistes, des sessions d’écoute, ainsi qu’un concert spécial diffusé par satellite sur VH-1, et des participations à des shows TV comme celui d’Oprah Winfrey. Même s’il le laissa assez peu paraître, Prince fut très tourmenté par le décès de son enfant qui est intervenu au moment même de la sortie de l’album. Prince a démenti les informations qui commençaient à figurer dans la presse, continuant à prétendre que « tout allait bien pour le bébé » alors que celui-ci était dans les faits déjà décédé.

L’album est paru le 19 novembre 1996. Le fait que le premier album édité après le contrat Warner soit un triple album est aussi une forme de revanche vis à vis de Warner, qui avait refusé la sortie de Crystal Ball, en 1986.

Enregistrements

L’album Emancipation a été presque intégralement réalisé en une année, d’octobre 1995 à octobre 1996, avec quelques exceptions : Somebody’s Somebody avait été enregistré avec Derek Hughes en novembre 1994, et New World a été créée en janvier 1994 sous le titre Love 4 1 Another. Prince a consacré l’essentiel des sessions à Emancipation. Il y eut toutefois deux digressions : en février 1996, Prince se marie avec Mayté Garcia et part ensuite en voyage de noces à Honolulu (où il donnera une série de concerts), et également en mars et avril 1996 Prince a finalisé l’album Chaos And Disorder à Miami avec une partie des NPG.
1996 emancipation early

Le track-list alternatif de l’album Emancipation

En juin 2017, le designer et photographe Steve Parke, qui travaillait avec Prince à l’époque de Emancipation a dévoilé un track-listing de travail qui présente une version sensiblement différente de l’album final. Elle intègre notamment des titres qui se retrouveront sur des albums / compilations comme Chaos And Disorder ou Crystal Ball, et d’autres restés inédits. Cette configuration date probablement d’avant avril 1996 date à laquelle le contrat de Prince avec Warner a été revu, ce qui a permis la sortie de Chaos And Disorder en juillet de la même année.

Éditions

L’album est paru en CD et en cassette.

  • Disc 1:
  1. Jam Of The Year (6:09)
  2. Right Back Here In My Arms (4:42)
  3. Somebody’s Somebody (4:43)
  4. Get Yo Groove On (6:31)
  5. Courtin’ Time (2:46)
  6. Betcha By Golly Wow! (3:30) 
  7. We Gets Up (4:17)
  8. White Mansion (4:47)
  9. Damned If Eye Do (5:20)
  10. Eye Can’t Make U Love Me (6:37) 
  11. Mr. Happy (4:46)
  12. In This Bed Eye Scream (5:40)
  • Disc 2:
  1. Sex In The Summer (5:56)
  2. One Kiss At A Time (4:40)
  3. Soul Sanctuary (4:41)
  4. Emale (3:37)
  5. Curious Child (2:57)
  6. Dreamin’ About U (3:52)
  7. Joint 2 Joint (7:51)
  8. The Holy River (6:55)
  9. Let’s Have A Baby (4:07)
  10. Saviour (5:48)
  11. The Plan (1:46)
  12. Friend, Lover, Sister, Mother/Wife (7:37)
  • Disc 3:
  1. Slave (4:51)
  2. New World (3:42)
  3. The Human Body (5:41)
  4. Face Down (3:16)
  5. La, La, La Means Eye Love U (3:58)
  6. Style (6:40)
  7. Sleep Around (7:41)
  8. Da, Da, Da (5:15)
  9. My Computer (4:36)
  10. One Of Us (5:19)
  11. The Love We Make (4:38)
  12. Emancipation (4:12)

Analyse

Présentant 36 nouvelles chansons pour un total de 180 minutes de musique (du jamais vu !), Emancipation est un formidable tour de force. La première question qui vient à l’esprit en découvrant ce coffret est de savoir si le concept d’un album peut raisonnablement tenir sur 3 CD. Probablement conscient de cela, Prince a donné à chacun des disques un semblant thématique qui permet de se plonger dans l’écoute de l’un ou l’autre individuellement.

Le premier CD contient les titres qui font référence au passé, aux amours déçues, et aux frustrations. Somebody’s Somebody, Right Back Here In My Arms, I Can’t Make You Love Me ou In This Bed Eye Scream (qui serait un message adressé à Wendy & Lisa) en sont l’illustration. Ce disque donne pourtant la part belle à un funk jouissif (Mr Happy, Get Yo Groove On) et un R’n’B évident (Jam Of The Year, Betcha By Golly Wow!).

Le second CD est plus axé sur le présent, c’est à dire l’histoire d’amour entre Mayté et Prince, et leur premier enfant. Le disque aborde aussi bien des thèmes romantiques (voire familiaux) que des sujets très sexuels. Il débute par Sex In The Summer où le bruit du coeur du bébé a été samplé lors d’une échographie ! Saviour, One Kiss At A Time, Dreamin About U et Soul Sanctuary sont des déclarations d’amour, et l’apothéose est atteinte avec Friend Lover Sister Mother/Wife, un titre enregistré en secret à Tokyo en janvier 1996 et joué pour la première fois lors du mariage de Mayté et Prince le 14 février. Let’s Have A Baby et son titre équivoque est l’une des ballades au piano les plus sincères de Prince. Curious Child est plus introspective encore, et peut faire référence à l’anxiété de la nouvelle paternité. Quant à Joint 2 Joint et Emale, elles abordent l’aspect charnel, tout en étant relativement imagées ce qui permet de rester dans l’atmosphère de l’album. Enfin, The Holy River évoque un domaine plus spirituel, marquant que ♪ les relations basées sur le physique sont terminées pour de bon ♪ Musicalement, ce CD contient essentiellement des ballades et des mid-tempo ce qui en fait le disque le plus lancinant de l’album.

Enfin, le troisième CD représente le futur sous les couleurs de l’amour et de la joie, mais aussi de la maturité et de la connaissance de soi. Ironiquement, le disque débute avec le morceau Slave (esclave) et se termine avec Emancipation. Prince décrit un nouveau monde, électronique et prometteur, dans New World, et poursuit le voyage techno avec The Human Body. Style impose sa présence et son excellence, tout comme l’évident La La La Means I Love U des Delfonics, un titre déjà repris par les Jackson 5. Le disque se termine par One Of Us, reprise de Joan Osborne, le grandiose The Love We Make, et le morceau titre qui est un funk détonant.

Emancipation avait pour objectif de démontrer qu’au milieu des années 1990 Prince n’a rien perdu de son inventivité et de son inspiration. Dans les faits l’album contient un matériel original de grande qualité. Pour autant, Prince a doté son triple album d’une production linéaire et feutrée, et à aucun moment le disque n’est démonstratif. Aucun morceau ne surnage vraiment par rapport aux autres, ce qui fut l’un des principaux reproches à être adressé à l’oeuvre. Sans hit majeur à l’image de Kiss ou de Cream, il était délicat de vendre un tel album où aucune des chansons n’est véritablement connue du grand public.

Chaque morceau pris individuellement démontre l’incroyable maîtrise stylistique de Prince et ses qualités de songwriter, de producteur et d’arrangeur, sans compter le chant et la performance solo en studio. En effet, après l’époque NPG, Prince revient à un travail très majoritairement solitaire sur cet album, bien qu’il y ait ici et là des participations extérieures.

L’album marque également une volonté d’ouverture, avec la présence pour la première fois de reprises de titres d’autres artistes (4 au total, dont Betcha By Golly Wow! qui fut choisie comme premier single). D’autre part, Kirk Johnson est crédité comme « producteur associé » et arrangeur, ce qui fut également une première.

Singles

Bien qu’initialement prévu comme un projet pouvant être exploité sur deux années, Emancipation n’a au final donné lieu qu’à peu de singles. La cassette NYC contenant des versions live de Jam Of The Year et Face Down est parue uniquement via le catalogue par correspondance de Prince. Une cassette de The Holy River contenant en face B un morceau inédit, Welcome 2 The Dawn, était distribué pour achat de l’album aux magasins Border’s aux Etats-Unis. Ce morceau sera édité plus tard sur l’album The Truth.
1996 thr cassette
Une cassette promotionnelle contenant les titres Slave et New World avait été distribuée au public d’un concert donné à Paisley Park le 9 décembre 1995.

  • Singles commerciaux
    • Betcha By Golly Wow! / Right Back Here In My Arms
    • The Holy River / Somebody’s Somebody
    • The Holy River / Welcome 2 The Dawn (Acoustic version) [cassette] US
    • Jam Of The Year (live) / Face Down (live) [cassette] US
  • Singles promotionnels
    • Slave / New World [cassette] US
    • Somebody’s Somebody (Ultrafantasy Edit 3:45) / (Radio Edit 4:30) / (Live Studio Mix 3:45) US
    • Face Down (X-tented Rap Money Mix 4:56) / (Instrumental Money Mix 3:58) / (A Cappella 2:21) – I Can’t Make You Love Me (Album Version 6:38) US

Critiques

Emancipation a reçu un accueil plutôt favorable, autour de 4/5, sans pour autant susciter une excitation extrême. Il faut dire que cet album est paru seulement quatre mois après Chaos And Disorder, sept mois après la BO de Girl 6 et à peine plus d’un an après The Gold Experience. D’autre part, plusieurs critiques se sont posées la question de la réelle nécessité d’un triple album, argumentant que plusieurs des titres servaient de remplissage et qu’il aurait peut être été préférable de faire un très bon double album ou un excellent simple album, plutôt qu’un triple.

Performances commerciales

Clamant que Emancipation est le disque « pour lequel il est né », et aux vues de la promotion orchestrée, toute l’attention était portée sur les résultats commerciaux du coffret. Et bien l’album s’en est bien sorti, il fut certifié double disque de platine aux Etats-Unis, atteignant la 11ème place du Billboard 200 et la 6ème place du chart R&B. C’est bien, mais ce ne fut pas autant qu’espéré. Surtout que la certification est trompeuse : la RIAA compte en effet les disques vendus et non pas les albums. Pour être certifié double disque de platine, il a suffit d’écouler 600 000 exemplaires du coffret qui comporte 3 disques. D’autre part, l’organisme américain se base sur les exemplaires « expédiés » et non pas les ventes réelles. Or EMI a inondé le marché avec l’album, qui s’est assez rapidement retrouvé soldé. Le prix de départ, affiché à $22.99 a rapidement chuté. Dans les années qui ont suivi, il était même possible de trouver le triple album au prix de… 2,99 € soit moins d’un euro le CD ! En Europe cela n’a pas été la folie non plus, l’album s’étant classé uniquement en Angleterre, aux Pays-Bas et en France. Au global il est toutefois estimé que le coffret s’est vendu à 1,2 million d’exemplaires.

L’ambition de mener ce projet « sur 2 ou 3 ans » s’est rapidement révélée caduque. Prince a semble t-il perdu de l’intérêt dans l’album après le décès de son enfant et les problèmes de couple qui ont suivi. D’autre part le label EMI a fait faillite en 1997, coupant court à toute promotion sur le long terme. En directe conséquence de cela, l’album The Truth qui devait recevoir une distribution mondiale après Emancipation, a été retardé. Il est finalement paru dans le coffret Crystal Ball, en 1998.

Héritage

Malgré un matériel conséquent, peu de titres extraits de cet album font partie du répertoire classique de Prince. Dès les premiers mois de la tournée Love 4 One Another qui suivit l’album, Prince supprima les titres du coffret pour les remplacer par ses tubes des années 1980. Le seul titre qu’il affectionne encore en concert est The Love We Make.

La note

En résumé

Titre :

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Les singles

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