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Sign ‘☮’ The Times (film)

Le film Sign ‘☮’ The Times est le troisième film de Prince après Purple Rain et Under The Cherry Moon. Il est sorti en salles le 20 novembre 1987 aux États-Unis, et dans les mois qui suivirent (jusqu’en 1990 pour sa première édition) dans le reste du monde.

Genèse

Le film Sign ‘☮’ The Times vient à la suite de l’album du même nom, qui a donné lieu à une tournée européenne en mai et juin 1987.

Alors que la fin de la tournée approchait, la question se posait de devoir mettre en œuvre une tournée américaine à la suite des shows européens. Créant la surprise dans son entourage, Prince annonça qu’il n’y aurait pas de tournée et qu’un film musical viendrait à la place.

Plusieurs raisons peuvent expliquer ce geste. En premier lieu, les ventes décevantes de l’album aux États-Unis. Fallait-il insister et mener une tournée sûrement éprouvante, ou plutôt faire un coup d’éclat avec la production d’un film ? C’est le deuxième choix qui a été retenu. D’autre part il faut rappeler que l’album Sign ‘☮’ The Times a été conçu dans la douleur, et qu’un grand nombre des morceaux le composant sont déjà vieux de plus d’une année et demie, et on sait que Prince n’aime pas s’éterniser sur un projet. Enfin, une autre raison est peut être l’impatience de Prince d’utiliser les studios Paisley Park. En effet le complexe, qui ne sera inauguré officiellement que le 11 septembre 1987, est flambant neuf. Le film Sign ‘☮’ The Times est la première production qui est réalisée sur place alors que la peinture est à peine sèche.

Prince convoqua à la dernière minute une équipe de tournage pour capter les 3 concerts de Rotterdam donnés les 26, 27 et 28 juin 1987. Pour disposer de davantage de matériel, l’ultime concert donné à Anvers le 29 juin fut également filmé. Un snippet très bref d’un des concerts donné à Paris Bercy est aussi visible mais il provient d’une captation en vidéo et non au format cinéma.

Le tournage s’est déroulé de façon assez chaotique, car les équipes n’avaient eu que très peu de temps pour s’organiser. Les bobines devaient être changées souvent et les assistants caméraman devaient courir les déposer à un endroit où elles étaient stockées. En revisionnant les bandes, il est vite apparu que l’image n’était pas d’assez bonne qualité pour produire un film au format cinéma. Seules les scènes les plus éclairées passent encore, et souvent elles étaient floues, granuleuses, ou mal cadrées. C’est alors qu’il a été décidé de réaliser le film aux Studios Paisley Park.

 

Enregistrement

Le tournage aux Studios Paisley Park a eu lieu sur 6 jours, du 18 au 23 juillet 1987. Prince réalisa le film lui-même, bien qu’il fit appel à Albert Magnoli, le réalisateur de Purple Rain, pour les scènes tournées en studio.

L’audio enregistré en 24 pistes a été remixé par Sheila E. Le groupe, sur la scène d’origine montée sur place, a joué en playback sur les pistes audio des concerts. Ce qui a permis aussi de faire des plans rapprochés, ce qui était plus complexe à faire dans une grande salle. Une centaine de figurants furent recrutés pour simuler un public devant Prince.

Au final, 80% des images présentes dans le film proviennent de ce qui a été filmé à Paisley Park. Il est d’ailleurs assez facile d’identifier les plans filmés en Europe car la qualité de l’image n’est pas la même, bien que les raccords soient plutôt bien faits.

Au départ il fut envisagé de présenter un concert intégral, puis l’orientation fut prise de se concentrer sur les titres de l’album, peut-être par manque de temps afin de pouvoir sortir le film dès l’automne 1987. Le seul titre plus ancien présent dans le film est Little Red Corvette, joué au piano entre deux morceaux. On y trouve aussi la cover du morceau Now’s The Time de Charlie Parker qui sert de présentation des musiciens et d’introduction au solo de batterie de Sheila E. Enfin, le clip vidéo de U Got The Look filmé à Paris le 16 juin 1987 et réalisé par David Hogan, est intégré en tant que séquence rêvée dans le film.

 

Éditions

Sign ‘☮’ The Times est sorti en salles le 20 novembre 1987 aux États-Unis. Une édition au format vidéo VHS est parue en mai l’année suivante, ce qui fut l’occasion pour beaucoup d’européens de voir le film, sa projection en salles en Europe, Japon et Australie n’ayant eut lieu que de façon très parcellaire. A Paris, le film est resté à l’affiche plusieurs mois au cinéma le Max Linder Panorama, dans les années 1989/90.

Édition japonaise originale du film Sign O The Times en Laserdisc

Une édition LD (Laserdisc) est parue en Allemagne et au Japon.

Dans les années 2000/2010, plusieurs ré-éditions eurent lieu en DVD dans des pays comme le Brésil ou le Japon, ou en distribution comme supplément bonus avec des magazines en Grande-Bretagne ou en Allemagne.

Une version remasterisée en 2K et son Dolby 5.1 est proposée dans les cinémas Pathé en novembre 2017.

Le 13 septembre 2019, le label allemand Turbine fait paraître une série d’éditions aux formats DVD et Blu-Ray remasterisés en 1080p et son Dolby Digital 5.1 canaux. Ils produisent également un coffret 4 disques, comportant à la fois les DVD et les Blu-Ray avec le film ainsi que de nombreux bonus dont une interview de Dr Fink.

Enfin, le 27 août 2025 (ou le 29 aux USA) le film ressort au cinéma au format IMAX, proposant une image encore améliorée et un son en 12.1 canaux. L’évènement est un succès et des séances seront prolongées durant les semaines suivantes dans certaines villes, dont la Géode à Paris.

Le film contient les morceaux suivants :

  • Sign ‘☮’ The Times
  • Play In The Sunshine
  • Little Red Corvette
  • Housequake
  • Slow Love
  • I Could Never Take The Place Of Your Man
  • Hot Thing
  • Now’s The Time [cover de Charlie Parker]
  • If I Was Your Girlfriend
  • Forever In My Life
  • It’s Gonna Be A Beautiful Night
  • The Cross
  • Sign ‘☮’ The Times [studio instrumental / générique]

 

Pochette du coffret 4 disques du film Sign O The Times proposé par le label allemand Turbine

 

Synopsis

Sign ‘☮’ The Times est essentiellement le témoignage d’un concert de la tournée du même nom, en se concentrant sur les titres issus de l’album. Il n’y a donc pas de scénario à proprement parler, cependant l’ajout des saynètes à certains endroits du film permet de lier les morceaux entre eux et d’en dégager une histoire.

Il est question d’un triangle amoureux entre la danseuse Cat, Greg Brooks et Prince. Au début du film, Greg et Cat se chamaillent en pleine rue et Cat s’enfuit, Prince décide de la suivre en courant. Après l’état de la société décrit dans Sign O The Times, et l’exaltation des sentiments exprimés dans Play In The Sunshine (« je veux te rencontrer, t’embrasser, t’aimer, et te manquer »), Housequake intervient comme une parade amoureuse dans une fête. Slow Love est alors le moment de révélation des amours naissantes, suivie d’une explication claire durant I Could Never Take The Place Of Your Man : « je ferai peut-être l’affaire pour un coup d’un soir, mais je ne prendrai jamais la place de ton homme ». Au début de ce titre, une saynète nous présente Greg Brooks méprisant sa compagne, racontant à un pote accoudé au bar (Wally Safford) que sa fiancée est enceinte et qu’en plus, elle voudrait qu’il lui parle.

Photo tirée du film

Durant Hot Thing, on devine que la séduction est à son paroxysme, Cat et Prince finissant ensemble. Dans U Got The Look, qui est une séquence rêvée dans le film, la chanteuse invitée Sheena Easton se voit pointée du doigt par un ensemble de danseurs. Prince peut être séduit par cette femme qui « a le look » mais au final c’est vers Cat qu’il revient. Arrive alors If I Was Your Girlfriend au début de laquelle Cat s’interroge : « il veut qu’on se mette ensemble, mais le loup n’est-il pas parfois déguisé en agneau ? ». Les doutes s’envolent vers la fin quand Prince et Cat se déshabillent mutuellement et s’accouplent sur un cœur qui s’élève doucement, les néons « love » et « sex » symbolisant cette union. Une nouvelle saynète intercalée avant Forever In My Life (au titre explicite) montre la bague qui symbolise l’engagement. Enfin, It’s Gonna Be A Beautiful Night célèbre l’évènement, et l’apothéose est atteinte avec The Cross, qui est une nouvelle fois une lecture de l’état de la société et un message d’espoir porté par l’amour.

 

Analyse

En choisissant de ne pas donner de tournée aux États-Unis et de la remplacer par un film, Prince fait un pari risqué, celui de voir son auditoire continuer à s’effriter dans son pays d’origine alors que l’Europe lui fait un accueil triomphal. Mais à cette époque les projets s’entrechoquent : les studios Paisley Park viennent juste d’être finalisés, et Prince veut déjà passer à autre chose musicalement. Le film est donc mis en œuvre sur un rythme effréné, avant même que les studios ne soient inaugurés, pour être distribué par un réseau indépendant Nord-Américain, Cineplex Odeon.

Le fait qu’une grande partie des images aient été tournées en studio (de l’ordre de 80% d’après une interview du saxophoniste Eric Leeds) fait que le résultat final a un rendu plus proche du clip vidéo que du cinéma. Les plans larges sont assez rares et d’une qualité médiocre, tandis que les plans rapprochés sont parfois filmés de très près, comme si les caméras étaient disposées sur scène. Le montage dynamique et les saynètes ajoutées par dessus le live renforcent ce sentiment.

Affiche de promotion pour le film Sign O The Times. La légende disait : « si vous devez aller à un seul concert cette année, choisissez le film de Prince » !

Malgré cela, le film est très proche de ce qui se déroulait effectivement en concert et on y retrouve toutes les caractéristiques de ce que l’on vivait sur scène. Et c’est là où on se rend compte de l’incroyable avancée de Prince sur les artistes contemporains de l’époque. A cette heure, aucun autre ne propose une telle profusion d’idées, une telle théâtralisation, une telle maîtrise de différents genres musicaux avec un groupe aussi acéré. Madonna ou U2 par exemple, ne donneront des concerts d’un niveau équivalent que dans les années 1990. Une mention toute particulière doit être faite à Leroy Bennet, qui a conçu une scène multiformes avec un décor spécifique à chaque morceau, et des lumières absolument sublimes pour l’époque.

La version remasterisée en IMAX renforce encore cette virtuosité, proposant un son démultiplié sur 12 canaux et une image brillante et élargie, ce qui malheureusement traduit aussi ses défauts : le clip de U Got The Look, filmé en vidéo et transposé en format cinéma, est d’une qualité déplorable, et les plans flous (il y en a un certain nombre) se remarquent plus fréquemment. Mais l’IMAX, lorsqu’il est joué dans une salle avec les capacités techniques attendues, donne quasiment l’impression d’être dans les conditions d’un concert réel.

Sign ‘☮’ The Times présente donc Prince sous son meilleur jour, à un moment de sa carrière où on peut considérer qu’il est à son apogée artistique, et dans une mise en scène brillante.

 

Réception

A l’instar de l’album, le film Sign ‘☮’ The Times n’obtint qu’un succès modeste aux États-Unis, malgré de très bons retours de la part des critiques. La distribution dans un circuit indépendant n’a pas aidé, puisque le film n’a pu ouvrir que dans 234 salles ce qui correspond à une petite sortie. Puis le film a rapidement disparu de l’affiche. C’est au moment de la sortie en vidéo, l’année suivante, que le succès fut plus probant.

Au cinéma le film a obtenu des recettes globales de l’ordre de $3 millions, ce qui lui permit tout juste d’être rentable bien que l’on ne connaisse pas précisément les coûts de production.

 

Héritage

Sign ‘☮’ The Times reste comme l’un des meilleurs témoignages de l’excellence de Prince en concert, même si l’on trouve un côté un peu « préfabriqué » en comparaison avec une captation live brute.

Date de sortie : 

20 novembre 1987

Réalisation : 

Prince

Scénario : 

Prince

Durée : 

85 minutes

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