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Paris, Bataclan, 28 octobre 2002

Cet article relate mon expérience vécue lors du concert de Prince au Bataclan, à Paris, le 28 octobre 2002. Il s’agit d’un aftershow faisant suite au concert du Zénith donné dans la même soirée.

Contexte

Le concert du Bataclan est l’un des aftershows proposés lors de la tournée One Nite Alone. Il fait suite immédiatement au concert du Zénith donné dans la même soirée. Il s’agit du quatrième aftershow donné dans le cadre de cette tournée, après Londres, Dublin, et Copenhague. Contrairement aux années précédentes où les aftershows donnaient lieu à une « chasse à la rumeur » intense dans les heures précédant l’événement, les aftershows de la tournée One Nite Alone sont prévus à l’avance, et – fait nouveau – il fut même possible d’acheter directement son billet sur le site NPG Music Club.

Toutefois, l’aftershow du Bataclan ne fut pas réservé qu’aux membres du club, puisque nous apprîmes à la fin du show du Zénith que ce concert tardif était aussi ouvert aux non membres. Le tarif d’entrée fut de $100 pour ceux qui avaient acheté leur billet sur internet, et de 100 € pour ceux qui l’achetèrent le soir même. Cette différence de devise provoqua un mécontentement parmi les membres du Club, car à cette époque le dollar était plus fort que l’euro, et ce sont donc les membres du NPGMC qui ont payé leur billet plus cher (d’environ 10 euros) que les non membres.

C’est la troisième fois que Prince se produit au Bataclan pour un concert tardif, la salle lui autorisant toute liberté et facilitant sa venue. La première fois eut lieu en 1994, à la suite de la prestation de Prince dans l’émission Nulle Part Ailleurs, puis en 1999 lors de la tournée de promotion de l’album Rave Un2 The Joy Fantastic. A cette dernière occasion l’entrée dans la salle avait été effroyable, et nous nous attendions au pire à nouveau cette fois-ci.

Avant le show

Une fois arrivés et stationnés aux abords du boulevard Voltaire, dans le XIème arrondissement de Paris, nous constatons en effet qu’une foule compacte s’est massée devant l’entrée de la salle, qui arbore déjà le nom « PRINCE » sur sa devanture.

Il faut imaginer la cohue des grands jours, avec trois populations entremêlées : les membres du NPG Music Club qui avaient déjà leur place, leurs « guests » potentiels, et ceux qui n’étaient pas membres mais voulaient une place. Sans compter ceux qui sont juste venus, excités par le concert du Zénith, pour participer à la fête. De plus il y avait des bracelets de couleurs différentes, selon que l’on était au soundcheck ou non.

Dès le départ nous comprenons que le service d’ordre est incompétent et aussi non briefé. Pour eux, le NPGMC, les guests, ou tout le reste, ça ne veut rien dire et ils s’en fichent. Ils tentent tant bien que mal d’organiser la foule mais en prenant des dispositions délirantes, comme repousser une barrière métallique avec une foule de gens massés derrière. Les esprits se sont échauffés et l’expression « Q.I. de moule » pour désigner le service de sécurité, restera un moment mémorable parmi les fans pendant de nombreuses années.

L’officiel du NPGMC, toujours le même, finit par arriver et tente, autant qu’il le peut, de gérer les entrées avec dans les mains une liste, dans l’autre un stylo, tout en prenant et rendant les cartes d’identité pour vérifier les noms. Pour ceux qui n’étaient pas membres, l’entrée se faisait aussi sur le côté de la salle dans la rue adjacente, mais il n’y eut aucune information à ce sujet et seuls ceux qui étaient présents par hasard à cet endroit ont pu entrer de ce côté.

La bousculade fut interminable et les entrées se font au compte-goutte. Au final, d’après nos informations, il y eut 540 réservations faites sur internet et 800 places mises en vente le soir même. On comprend mieux pourquoi le show fut ouvert au public, de manière à mieux remplir la salle. Mais au final, le show n’affichait même pas complet !

Une fois entré dans la salle je constate que la fosse est bien remplie, et la coursive en hauteur qui en fait le tour est déjà squattée en tout endroit. C’est bien dommage, car j’espérais me reposer un peu en m’appuyant sur les barrières. Mais non, il va falloir rester debout ce qui n’est pas évident car la fatigue commence à se faire ressentir alors que le show n’a même pas débuté ! Debout depuis le matin, excité par l’attente devant le Zénith et sous le soleil, avec les émotions du soundcheck, puis le concert principal qui a duré tout de même plus de 2h30… ça faisait déjà beaucoup. J’arrive tout de même à me glisser dans les premiers rangs de la fosse.

L’attente se fait au son des mixes de DJ Dudley, et les musiciens entrent en scène à 2h15 du matin…

Le show

A 2h25 Prince entre sur scène à son tour et se couche par terre tandis qu’un groove batterie / piano tourne. Le show va commencer par deux impros jazzy / électro de très haut niveau qui mettent tout le monde à genoux. Mais comment fait il pour atteindre ce niveau d’excellence, cette maîtrise musicale, et avoir encore l’énergie à plus de deux heures du matin, de sortir un truc pareil ? C’est incontestable : Prince est toujours le plus grand musicien contemporain, un extra terrestre de la musique, un cas à part qui fait corps avec son art. Quelle chance nous avons de pouvoir vivre ces moments, de le voir toujours en activité, lui le dernier représentant de cette époque illustre. Il ne passe plus en radio, ou le grand public ne sait plus qu’il existe ? Peu importe, et dans un sens tant mieux. Car il continue de livrer, pour nous ses fans, une musique exceptionnelle dont nous nous régalons.

Le show débute effectivement par un jam à la guitare qui vient accompagné d’un chant malicieux, « Good Morning 2 U » que le public reprend aussi. Prince entame un set électrique surpuissant avec des versions qui feraient pâlir n’importe quel prétendu virtuose de la guitare. Malheureusement le son est très mauvais, saturé et vraiment insupportable par moments dans les premiers rangs. Il est bien plus agréable de reculer au fond de la salle, pour admirer le concert depuis les estrades et apprécier le show dans son ensemble. Ceux qui ont squatté dès le début les gradins et les barrières avaient vu juste. Le set électrique durera un bon moment et sera l’occasion de longs passages instrumentaux incluant : BambiWhole Lotta Love (+solo de Renato) – Family NameSomething In The Water (+solo de Candy) – The Question Of U (+solo de Renato) – The One / Fallin / Take 5 / Ain’t No SunshineShe’s Always In My Hair (fantastique) – et une nouvelle version de Peach difficilement reconnaissable au début et agrémentée d’une partie cuivres spécifique, avec de nombreux solos et le chant « It Ain’t Over » puis vient Shake et I Don’t Want Nodody To Give Me Nothing, de James Brown.

On glisse donc doucement vers la Soul et le Funk, à l’aide tout d’abord d’un instrumental reprenant les bases de The Work, avant que ne débute le morceau proprement dit, incluant plusieurs solos de cuivres et un solo de Blackwell. Prince empoigne la basse de Rhonda Smith et part sur le riff de 777-9311. Il continue ensuite dans un long medley old-school incluant un jeu de basse incroyable de la part de Prince (quel virtuose!). On entendra successivement : Hair (+solo de Renato) – Brickhouse (+solo de Maceo) – Skin TightCool avec solo de Greg, puis un jam à la basse.

Nous étions déjà rassasiés, mais après une brève pause Prince revient aux claviers cette fois. Il part dans un délire techno assez long et très impressionnant, accompagné par Blackwell et les cuivres. Renato le rejoint peu après et Blackwell se lance dans un solo.

Prince retourne à la guitare pour Alphabet St. se prolongeant avec un jam comprenant des allusions à Johnny. La foule entame alors le célèbre refrain « NPG In The MF House », mais Prince arrête la musique et dit « on ne fera rien à la mère de qui que ce soit ce soir »… il dit que ce chant là est trop vieux, et il a quelque chose de neuf : « NPG In This Funky House » que le public adopte immédiatement. Plusieurs solos de cuivres et de claviers ont lieu ensuite, avant que Prince ne parte sur le très attendu All The Critics Love U In Paris avec solo de Maceo. Retour à la guitare électrique pour Dolphin dans une version blues assez spéciale et un nouveau Santana Medley très inspiré avec 2 solo de Renato.

A un moment donné dans tout cela… j’ai eu une absence. Pris de vertige et accablé par la fatigue, je n’ai pas d’autre choix que de me retirer vers l’arrière de la salle et m’assoir sur une marche. J’ai du rester ainsi 10 ou 15 minutes, ratant évidemment une partie du show. Et lorsque je relevais un peu la tête, je voyais au loin dans un brouhaha de lumières et de son, un petit lutin habillé tout de noir continuer à s’exciter sur scène comme jamais, entrainant avec lui le public qui résistait encore. C’est là où j’ai commencé à me dire qu’il aurait mieux fallu la jouer cool pour le Zénith, afin de garder des forces pour la suite. Mais qui pouvait prévoir que nous en recevrions autant ? Une fois le coup de pompe passé, je m’approche à nouveau de la scène.

Il y a un nouveau break, et on pense alors que c’est fini mais les lumières de se rallument pas et l’ambiance est encore très chaude. Le beat de Come On est lancé par Prince qui est de retour aux claviers, alors que les musiciens ont quitté la scène. John Blackwell le rejoint à la batterie. Pendant quelques instants, il semblait que les autres membres du groupe ne voulaient pas revenir. Ils en avaient probablement assez eux aussi. « Fatigué ? » demande ironiquement Prince au public à plusieurs reprises, en français dans le texte. Et même si on n’en peut plus, on en redemande encore.

Finalement, Renato se pointe et remplace Prince aux claviers. De nouveaux chants sont lancés : « Party Til The Sun Comes Up » et une version lentement groovée de Housequake avec le chant « Paris, what time is it? » auquel la foule répond « It’s Time To Get Funky », alors que le reste du groupe a rejoint ses positions. Maceo Parker et Greg Boyer sont ceux qui semblent les plus fatigués, quelque part c’est rassurant. Greg en profite pour faire un solo, rapidement suivi de Maceo.

Après cela, le groupe quitte une nouvelle fois la scène. Cela semble incroyable mais à presque cinq heures du matin nous sommes encore en train de nous poser la question de savoir s’il va revenir une ultime fois ou non. Les lumières restent éteintes un assez long moment. Reculé une nouvelle fois vers le fond de la salle, j’aperçois à la console de mixage le garde du corps de Prince, Trevor, qui vient récupérer un CD fraichement gravé avec le contenu du show. Il se passe quelques minutes (le public chante toujours) puis les roadies viennent démonter la scène. Je suis presque sur que Prince aurait pu continuer, mais le groupe était probablement HS.

Après le show

Nous ressortons du Bataclan dans un état pitoyable et complètement hébétés. Qui pouvait penser qu’on retrouverait, plus de quinze ans après, le même sentiment qu’à la sortie du concert du Zénith de 1986 ? On se regarde, encore trempés de sueur, on ose à peine parler sur le trottoir devant le Bataclan au petit matin. Dans les discussions on évoque les dates historiques des concerts ou des afters de Prince, en se disant que celui là figurera assurément dans le Top 10.

Regardons : nous avons eu du funk, de la soul, du jazz, de l’électro, du rock, tous interprétés brillamment. Prince a chanté, joué de la guitare, de la basse, des claviers. Le show a duré plus de deux heures et demi, de 2:25 à 5:00. Au total, avec le soundcheck et le concert du Zénith, nous avons eu droit à plus de six heures de show dans la même journée !

Musiciens :

Set list :

John Blackwell : batterie
Renato Neto : claviers
Rhonda Smith : basse
Candy Dulfer : saxophone
Greg Boyer : trombone
Maceo Parker : saxophone
instrumental jam
instrumental jam incl. ‘Good morning 2 U’
Bambi
Whole Lotta Love
Family Name
Something In The Water (Does Not Compute)
The Question Of U / The One / Fallin’ / Take Five / Ain’t No Sunshine
She’s Always In My Hair
Peach (incl. It Ain’t Over / Shake)
The Work Pt. 1 (incl. I Don’t Want Nobody To Give Me Nothing )
777-9311 / The Stick / The Walk (instrumental)
Hair
Brick House
Skin Tight
Cool

instrumental jam
Alphabet St.
Johnny
All The Critics Love U In Paris
Dolphin
Santana Medley

Come On (instrumental) incl. ‘Party ’Till the sun comes up’ chant
instrumental jam (incl. Housequake / « It’s time to get funky » chant)

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